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De Sainte Alvère à Saint-Astier (Dordogne)

Mamicha jeudi 31 juillet 2014 , , , ,







Manzac sur Vern






















Saint-Astier




La ville et son nom sont liés à l’histoire d’un homme, Astérius, 
fils d’une famille romaine, né au VIe siècle à Puy-de-Pont, 
à l’embouchure de l’Isle et du Salembre, près de Neuvic-sur-l'Isle. 
La légende veut que, devenu ermite, il réalisa de nombreux miracles 
donnant au lieu une certaine renommée. 
Une première église est bâtie à proximité de l'ermitage, 
dans laquelle le saint sera inhumé à sa mort. 
Aujourd'hui, cette église n'existe plus, mais, dans une grange à la chapelle des Bois, 
on peut toujours voir deux colonnes dans l'épaisseur de la maçonnerie. 



Son tombeau attirant la dévotion des fidèles, 
un monastère s’installe à proximité de la rivière, entouré de quelques maisons. 
Sur les rives de l’Isle, la petite bourgade naissante 
subit de plein fouet les invasions qui ravageront le Périgord. 
Vers 849, les Normands saccagent le bourg et le monastère, 
mais aussi l'église, près de la chapelle des Bois. 


C'est au Xe siècle que sont jetés les fondements d'une nouvelle église 
à Saint-Astier, par Raoul de Scorailles. 
En 1013, une église fortifiée flanquée d'un monastère de chanoines réguliers, 
est consacrée en présence des évêques de Toulouse, de Saintes et d'Angoulême. 
Les reliques de Saint-Astier y sont alors transférées. 


En 1219, Saint-Astier devient l’une des trente-quatre villes fortifiées du Périgord, 
se protégeant en particulier du côté de la rivière. 
L’église elle-même fait l’objet de fortifications successives, 
lui donnant son aspect massif actuel. 
Incendiée, elle est reconstruite au XIe siècle 
et connaîtra plusieurs modifications jusqu’à nos jours


Sous la Révolution, Saint-Astier est à l'abri des horreurs sanguinaires. 
Le chapitre est dissous et les chanoines doivent s'enfuir, 
mais l'échafaud ne sera pas dressé en place publique. 
Le tribunal révolutionnaire de Périgueux prononce quelques arrestations, 
mais les condamnés, principalement des propriétaires agriculteurs, 
sont retenus prisonniers dans leur propre maison. 


Le 10 novembre 1797 (20 Brumaire an VI), sur la place de la Liberté
 - aujourd'hui place de l'Église - 
un "arbre de la Liberté" est planté sous les cris de
 "Vive la République ! Vive la Paix !".
À remarquer que, dans ses écrits, 
le comité révolutionnaire parle de "la commune du dit Astier"
le mot Saint étant alors proscrit...


L’événement marquant du XIXe siècle est la construction 
d’un pont permanent sur l’Isle, en remplacement des fragiles passerelles en bois, 
auxquelles chaque crue est fatale. 
Dès 1829, monsieur Faucherie de Valbrune décide de se consacrer 
à la réalisation de cet ouvrage. 
Un appel à souscription est lancé. 
Les astériens et les communes environnantes répondent pour une somme de 56 000 francs. 
Le pont, commencé en 1831, est livré à la circulation le 12 octobre 1832,
 puis élargi en 1888 pour y construire deux trottoirs.



À proximité de la rivière, Saint-Astier fut concerné par le projet qui, en 1820, 
devait rendre l’Isle navigable de Périgueux à Libourne. 
Sur la commune, on établit trois écluses et un canal de dérivation de 1 300 mètres. 
Le 26 avril 1835, un bateau génois fit l’objet de la curiosité des astériens. 


2 août 1914 : la ville de Saint-Astier tremble à l'annonce de la mobilisation, 
car rares sont les familles qui ne sont pas touchées par la nouvelle. 
Tandis, que la gare est encombrée par les départs, les femmes, les enfants 
et les vieillards travaillent courageusement à l’achèvement des travaux agricoles. 
Tous ont au cœur l'espoir que la guerre sera courte. 
Le 7 septembre 1914, des milliers de soldats du 73e de ligne 
venus de Béthune débarquent à Saint-Astier ; plusieurs jours durant, 
il faut trouver des logements, dans la ville, dans la campagne, pour les soldats. 


En 1916, c'est "l'enfer de Verdun"
Beaucoup de soldats du Périgord sont au cœur de l'horreur. 
Saint-Astier connaît cette année-là plus de trente morts et de nombreux blessés.
Enfin, le 11 novembre 1918, les cloches de l'église et des villages, 
résonnent pour annoncer l'armistice. 
En tout, ce sont 135 noms d'enfants du pays qui seront gravés 
quelques années plus tard sur le monument aux Morts. 


Le 3 septembre 1939, l'Angleterre et la France déclarent la guerre à l'Allemagne. 
Personne ne sait alors qu'elle durera plus de cinq ans. 
À Saint-Astier, c'est alors un flot perpétuel de nouveaux arrivants, 
de civils et de militaires, des camions et des services du ministère de la Guerre. 


C'est en 1943 que les Allemands s'installent à Saint-Astier, 
investissant par les carrières que l'extraction de la pierre à chaux a creusées 
sur plus de 10 hectares et dont certaines font plus de 500 mètres de longueur. 
Recouvertes d'une épaisse couche calcaire, c
es carrières sont des refuges capables de résister aux plus forts bombardements. 


Le 7 juillet 1943, les allemands arrêtent le maire de Saint-Astier, Albert Chanraud. 
Conduit en Allemagne comme déporté politique, il y meurt le 3 mars 1945.
Le 17 août 1944, les soldats allemands préparent leur départ 
dans la plus grande discrétion et s'apprêtent à dynamiter les carrières. 
Mais avant qu'ils puissent achever leur sinistre besogne, 
l'Armée secrète, qui encercle la ville, envoie au chef allemand un ultimatum. 
Après une entrevue entre le capitaine Marc de l'AS et le capitaine allemand, 
ce dernier annonce la reddition de son groupe. 
Désarmés et fouillés, les 67 soldats allemands furent emmenés avec les honneurs militaires. 


Alors que la Résistance se bat partout en Dordogne 
pour désorganiser les troupes allemandes, 
ces dernières quittent Périgueux le 19 août pour se retirer vers l’Ouest. 
C’est dans ce contexte qu’une bataille s'engage à Saint-Astier 
le 20 août entre l'Armée secrète et les forces ennemies.
 Une fois entrées en ville, les troupes nazies raflent dix-neuf otages. 
Deux parlementaires, dont le curé de la ville - l'Abbé Lafaye - 
se proposent pour porter un message et ainsi, éviter de faire couler le sang.



Le 20 août 1944, vers 20 heures, les dix-neuf otages et les deux parlementaires, 
sont fusillés aux Quatre-Routes, 
dans un pré enclavé entre des jardins et bordé d'un ruisseau. 
Un monument, orné d'un bas-relief de Gilbert Privat 
représentant les otages attachés avec la même corde avant le supplice, 
porte cette épigraphe : 
"Aux martyrs de la barbarie allemande
 fusillés en ce lieu le 20 août 1944".


Cet épisode est d’autant plus important 
qu’il marque la libération de la ville du joug allemand. 
Chaque année, une cérémonie rassemble de nombreux astériens 
animés par l’impérieuse nécessité de ne pas oublier, 
 par respect pour les otages et leur famille, derniers témoins de la barbarie nazie, 
par respect pour tous ceux qui se sont engagés dans la lutte clandestine, 
par respect pour ces vivants qui nous ont donné une leçon de vie. 


Les manufactures de chaussures

L'industrie de la chaussure en vallée de l'Isle 
fait partie de la culture et de la mémoire locale. 
Si les usines ont disparu, il en reste des souvenirs forts 
qui marquent aujourd'hui encore le territoire. 
À Saint-Astier, deux usines ont employé jusqu'à deux cents ouvriers et ouvrières. 


Fondée en 1913, l'usine Georges est construite en partie sur pilotis sur la rivière, 
à l’emplacement d’une ancienne filature de laine. 
Absorbant le moulin voisin, elle utilise la force de l’eau pour faire fonctionner ses machines 
et dispose ainsi d’une puissance hydraulique de 80 cv. 
 L’usine a pu produire jusqu’à 600 000 paires de chaussures par an, 
qui portaient la marque déposée L’Astérien, qui deviendra Aster. 
 Incendiée durant la seconde guerre mondiale,
 il ne reste aujourd’hui de la manufacture que la plate-forme à côté du barrage. 
Après la guerre, la famille Georges construisit une nouvelle usine sur la zone de la Borie, 
avant de s’installer à Saint-Germain-du-Salembre. 


La maison Bertrand, fondée en 1930,
 emploie une trentaine d'ouvriers au cœur de la ville, 
dans une usine massive à plusieurs étages, avec galeries et cour intérieure. 
D'une puissance de 30 cv, elle fournit jusqu'à 300 000 paires par an 
et s'est spécialisée dans la sandalette et dans la chaussure appelée Le Charentais.
Aujourd'hui, l'ancienne usine Bertrand accueille l'espace culturel, 
le cinéma et la médiathèque de Saint-Astier. 
Dans les années 90, c'est en hommage à cette mémoire ouvrière 
que le bâtiment a été baptisé La Fabrique


La chaux blanche

À l’heure où la chaux retrouve ses lettres de noblesse dans le bâtiment, 
la chaux de Saint-Astier a su prendre une place essentielle et incontournable 
sur le marché national et européen de la restauration. 

 En 1835, seul un four à chaux était signalé sur la commune. 
C'est en 1850 que Louis Vicat, ingénieur des ponts et chaussées, 
prospectant les ressources du pays, 
met en évidence les propriétés du calcaire du bassin de Saint-Astier. 
Ses recherches assurent que le calcaire de Saint-Astier peut convenir 
à la fabrication d’une chaux naturelle pure, 
dont la faible hydraulicité permet son emploi en milieu humide.


Le banc calcaire de dix kilomètres de long appartient à l’ère secondaire, 
groupe crétacé supérieur, étage Campanien (75 millions d’années). 
Ce calcaire provient de dépôts marins constitués de coquillages, 
coraux, marnes et autres animaux infiniment petits et nombreux. 
La mer ayant été très calme, cela donne des couches d’une grande régularité 
sur plusieurs centaines de mètres d’épaisseur 
et une composition chimique et minéralogique du calcaire constante


Dans son ouvrage, l'abbé Nogué recense quinze usines créées entre 1852 et 1932. 
Même au plus fort de la conquête du ciment, au début du XXe siècle, 
alors que la plupart des chaufourniers disparaissent, 
les chaux de Saint-Astier résistent grâce à la qualité de ce calcaire si particulier 
et à la volonté des dirigeants de moderniser régulièrement les sites de production. 
Dès 1906, l'Union des Chaux, 
qui regroupe les principaux chaufourniers de Saint-Astier, est créée. 



Aujourd'hui, le bassin de Saint-Astier, unique en Europe 
par l’homogénéité de son gisement calcaire, 
regroupe trois usines de production qui distribuent des chaux naturelles 
et des enduits prêts à l’emploi :  
Safa, Cimchaux et Dordognaise.  
Les chaux pures résultent exclusivement de la cuisson d’un matériau calcaire 
suivi d’une extinction sans aucun additif. 



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